Alors que la guerre en Ukraine est entrée dans son quatrième mois, l’agence de notation Moody’s a publié le 16 mai dernier une note consacrée aux répercussions engendrées par ce conflit sur les finances des collectivités. La conclusion est plutôt encourageante pour les collectivités françaises, dont le niveau de dette ne devrait pas être trop durement affecté.
Le conflit pourrait se répercuter sur les finances locales via deux canaux : l’inflation et le ralentissement prolongé de l’économie. Cette répercussion aurait des effets réels, mais limités. Moody’s estime en effet que pour les collectivités locales françaises, les risques de crédit tout comme ceux portant sur l’environnement global sont essentiellement bas.
Le retour de l’inflation va peser sur les budgets locaux
De tous les contrecoups du conflit ukrainien, l’inflation est sans doute celui qui va peser le plus sur les finances des collectivités françaises. Elle va en effet accroître les dépenses de personnels, confrontant les employeurs publics à un important enjeu financier. Le renchérissement du prix de l’énergie consécutif à la diminution des importations d’hydrocarbures russes concernera avant tout les opérateurs de transports en commun. Pour les bailleurs sociaux français, qui supportent plutôt que les locataires le coût des factures d’énergie, la hausse des tarifs du gaz pourrait « affaiblir les flux de trésorerie et augmenter le risque d’arriérés de paiement ».
Les collectivités françaises ne sont pas pour autant plongées dans une situation particulièrement critique : le gaz ne représente que 16 % de la consommation énergétique du pays, le gaz russe en particulier 2,7%. En parallèle, Moody’s remarque qu’« une inflation plus élevée est susceptible de produire des revenus exceptionnels pour les collectivités dont les revenus sont corrélés au PIB nominal », citant explicitement les collectivités françaises dans cette situation.
Quelle influence d’un ralentissement prolongé de l’économie ?
Un ralentissement prolongé de l’économie serait dommageable à beaucoup de collectivités, confrontées à un effet ciseaux sur leurs budgets : diminution des ressources assises sur l’impôt, conjuguée à l’accroissement des dépenses sociales. La note publiée par Moody’s remarque néanmoins que plusieurs éléments contribuent à préserver, au moins en partie, les collectivités françaises :
- Celles-ci sont moins exposées à une dégradation de la conjoncture économique que leurs homologues allemandes ou autrichiennes.
- Les taux fixes protègent davantage les collectivités lorsque celles-ci empruntent en période d’inflation. Moody’s remarque toutefois que l’indexation de la plupart des crédits des bailleurs sociaux sur le livret A ne devrait pas s’avérer trop pénalisante, en raison du Mécanisme de révisabilité de l’annuité qui permettra de préserver les trésoreries.
Les collectivités françaises bénéficient d’une certaine souplesse financière et de plusieurs dispositifs de soutien pour franchir cette passe difficile
Moody’s pointe la flexibilité fiscale moyenne induite par le cadre légal et institutionnel dans lequel opèrent les collectivités. Celles-ci peuvent néanmoins envisager « de reporter certains projets si les pressions financières s’accentuaient ou si certains projets devenaient trop coûteux ». En France particulièrement, elles « disposent de marges opérationnelles leur permettant d’amortir les pressions inflationnistes croissantes ».
Les perspectives tracées par Moody’s sont donc plutôt positives. Subsistent cependant des incertitudes liées à un ralentissement de plus longue durée. Moody’s remarque qu’une dégradation économique prolongée « poserait des problèmes particuliers aux collectivités qui dépendent des recettes fiscales et aux autorités chargées des transports en commun dépendant des tarifs ou des taxes. La plupart des collectivités seraient concernées, car les recettes fiscales représentent environ 60 % de leurs recettes »